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Photo du rédacteurLe collectif du doute

La NOUVELLE REPUBLIQUE en difficulté

La publication d’un récent article sur la pédocriminalité dans l’Eglise laisse planer des doutes sur la capacité du journal à traiter ce genre d’affaire.


Ah ! Le personnel n’est plus ce qu’il était ! Comment penser le contraire à la lecture du dernier article sur la pédocriminalité dans l’Eglise daté du jeudi 29 septembre 2022 ? Ce journal local aurait-il des difficultés à trouver dans ses services les compétences adaptées au traitement de ce sujet au combien complexe ? Jusqu’à ce jour, si le compte est bon, six journalistes ont apporté leur contribution dans la couverture des événements relatifs à l’affaire Tartu. Pourtant, aucun n’a réussi à cerner sa singularité.


Ce quotidien a été le premier à lancer la campagne. Le premier témoignage n’a pas manqué d’émouvoir. N’était-ce pas le but recherché ? Naturellement, l’exposition d’une seule version des faits, sans vérification ni contradictoire, a forcément suscité le scandale. Malheureusement, d’autres témoignages calomnieux ont suivi, impliquant les Petit chanteurs de Touraine, sans autre validation que le micro-trottoir. La négligence des articles 5 et 8 de la charte de déontologie de Munich sur les devoirs des journalistes a sans doute dû échapper aux rédacteurs, certainement dépassés par l’intensité des révélations.


Puis, le Collectif du doute les a conviés à sa conférence de presse. Leur délégation – de retardataires au passage - était très attendue pour lever ces « mal-entendus ». Mais la première question venant de leur part était déjà chargée d’incompréhension. « On ne comprend pas très bien en fait » (à 1’43 sur youtube) [1]. L’insistance des journalistes fut grande pour bien saisir la position du collectif (à 21’50 et 56’27). Ils étaient quatre de la Nouvelle République, et pourtant, le lendemain, malgré un site internet complet, un dossier de presse de trente pages, des articles étayés, sourcés, argumentés, une documentation complète, un discours et une heure de réponse aux questions… le rédacteur confiait sa difficulté à saisir les intentions du collectif : « Un combat dont les motivations restent difficiles à comprendre. » Trop compliqué.


Quelques temps plus tard, le Père Tartu fait savoir par un communiqué de presse sa version des « faits » ; mot que l’on cite à l’envi dans les articles sans jamais dire précisément lesquels. Encore une fois, l’incompréhension domine. « Un choix dans le calendrier qui interpelle […] Une version difficile à comprendre ». Impossible pour le journal, visiblement, de réussir à cerner l’intégralité de la déclaration. Seul un extrait a été publié. Le Père Tartu s’en est plaint. Réponse en substance : cette version n’entre pas dans la ligne de ce qui a été écrit précédemment. La dialectique n’a pas dû être intellectuellement tenable pour risquer de négliger ainsi les articles 2, 3 et 6 de la charte de Munich. L’exercice du métier doit certainement paraître bien difficile pour devoir en rester aux « vérités » de chacun, sans jamais pouvoir dépasser le stade de la subjectivité et remonter aux faits, sans explorer les pistes évoquées. Le journaliste est resté bloqué sur les faux aveux replacés dans une vidéo mise en lien en bas de l’article. Le regard critique du CDD n’était visiblement pas à sa portée, malgré les premières précisions expliquées à la conférence de presse.


A la conférence du 27 septembre donnée par Mgr Jordy, le suivant n’a pas fait mieux. Le pauvre devait tellement avoir le Père Tartu dans le pif qu’il n’a pas pu voir plus loin que le bout de son nez. Il a fallu qu’il ramène l’affaire sur le tapis alors que Mgr Jordy n’en a pas parlé. En fin de conférence, l’Archevêque a évoqué des cas locaux. Ce dernier laissait supposer qu’il s’agissait de ce prêtre et tous ont compris qu’aux dernières nouvelles, récentes de surcroît, l’instruction n’était pas finie que l’on ne pouvait rien en dire pour le moment.


Quelqu’un saurait-il lui expliquer ce que signifie « rien en dire » ? Avec un sens élémentaire de l’investigation, il aurait pu, par exemple, vérifier l’information auprès du Procureur pour préciser l’avancement de l’enquête, revenir par exemple sur le communiqué du Prêtre incriminé, explorer les pistes du collectif du doute, juger bon d’attendre les conclusions, comprendre que le diocèse reste au point mort sans conclusion de la justice… Non. A se demander si les précédents articles de son journal ont été lus. L’abbé Tartu a tout nié mais on attend encore des aveux. La NR a publié l’ignorance de l’Eglise mais il fait encore citer les «torts» de l’institution. Il place en lien un vieil article sur la recherche de victimes, or, cela fait longtemps que l’on n’en trouve plus. Le Père Tartu a été le premier à demander une entrevue avec les plaignants [2] et il laisse les rôles s’inverser. Il a reconnu les Voix libérées dans l’assistance et n’a même pas remarqué les membres du CDD présents à leur conférence de presse. Etc.


Rapporter l’essentiel de la soirée, c’est bien, mais connaître ses dossiers c’est mieux ; surtout si l’on veut appliquer l’article premier de la charte de Munich. Sinon, pourquoi mentir par omission ? Cette obstination à ressortir des lieux communs hors sujet manifeste un manque de prise avec le réel inquiétant.


Mais, que les journalistes de la NR se rassurent. Leurs inconséquences auront peu de conséquences. Leurs papiers peuvent être partiels, et donc partiaux, ils ne seront pas inquiétés. On ne donnera pas de suite aux éventuelles recours en justice. Le CDD a déposé plainte contre la NR pour son refus de publier un droit de réponse. La Procureur de la République a répondu qu’il ne poursuivait pas les délits de presse. On comprend pourquoi le directeur de la publication n’a pas jugé utile de répondre à nos deux sollicitations. La NR sait qu’elle n’encourt aucune poursuite, se sent protégée et le droit de réponse du CDD encadré par la loi est impunément bafoué. En d’autres termes plus imagés, quand on sait qu’on ne peut pas prendre de châtaignes, on fait des marronniers.


Difficulté à recruter les compétences, à payer du personnel plus qualifié, un manque de moyen pour mener des investigations efficaces… ? Toutes les hypothèses sont envisageables pour tenter de mesurer la peine de ce journal à produire une information de qualité. Sinon, comment croire qu’elle inscrive délibérément dans sa pratique éditoriale un tel manque de rigueur intellectuelle et de déontologie ?


La Nouvelle République fait partie de ces organes de presse nés de la Résistance, au sortir de la Seconde Guerre mondiale. Comme d’autres, il lui fallait un nom qui manifeste la fin de cette période trouble de l’histoire marquée par les ravages des dictatures. La liberté recouvrée, à cette époque, faisait naitre de nouveaux espoirs démocratiques et son enseigne manifestait le retour d’une presse libre, indépendante et ouverte au pluralisme. Tout un symbole ! Il avait ses chantres.


Comment imaginer aujourd’hui, malgré les difficultés, qu’il puisse en être autrement ? Comment la trahison de ces origines pourrait-elle être possible ? Sinon, il faudrait se résoudre à considérer ce journal comme le diffuseur régional officiel de la pensée unique [3], des idées toutes faites, des idéologies nouvelles… et des nouveaux totalitarismes, ouvert aux facilités abusives de la machine médiatique actuelle attachée au « buzz », à la délation, aux scandales, au harcèlement… (Cf. notre analyse)


Est-ce vraiment possible ? Dans ce cas, la Nouvelle République n’aura jamais aussi mal porté son nom.

[1] On remarquera pendant cette conférence de presse la tendance à vouloir imposer l’idée que le CDD conteste la douleur ou minimise la gravité des plaintes. L’idée que le journaliste tente d’insinuer ou d’imposer est inacceptable pour le CDD et contraire à ses déclarations. L’idée d’opposer la douleur du collectif à celle des plaignants est tout aussi inacceptable.

[2] Depuis, le collectif a demandé à rencontrer l’Abbé Tartu. En l’absence d’une médiation impartiale possible, ce dernier a refusé. N’a-t-il pas demandé « les yeux dans les yeux » ?

[3] Jean-Marc Chardon, Denis Lensel, La pensée unique, le vrai procès, Économica, 1998, 265 pages.

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